dimanche 22 septembre 2013

"Night and Day"...

J'ai croisé avant-hier deux journalistes totalement hilares. Elles venaient d'apprendre qu'elles ne travaillaient plus au service "Région" ou "Infos générales" de leur canard, mais au "Night and Day Desk". Ça c'est chouette, et ça change tout: le management fait buzzer dans le backstage! Mais bon, jargonner en américain, moi, je trouve que ça fait un peu ringard de nos jours, très années 80, quoi. Tant qu'à vouloir faire du nouveau, je trouve que leur technostructure aurait pu mettre "Nox et dies", ou, pour rester dans la proximité, "Nacht-und-Tag Büro"... Non?

mercredi 13 mars 2013

Le mot du jour: «dithyrambique»

Nos amis du Canard Enchaîné ne se sont pas trop foulés pour écrire cet articulet, paru dans la livraison de ce jour. Il leur a suffi d'aller piocher dans le site du SNJ pour récupérer un communiqué plutôt bien senti... Bonne pioche, en tout cas. Et bel exemple des liaisons dangereuses entre le monde de la presse et le monde de la banque, même si d'autres ont atteint dans ce domaine des sommets bien plus élevés. On signalera juste que Le Journal de la Saône n'existe pas; en réalité, c'est Le Journal de Saône-et-Loire. Ça ne vaut pas un pan sur le bec.

dimanche 10 mars 2013

Evêché.com...

Le pape n'est pas mort, mais un nouveau pape est tout de même appelé à régner, et je replonge du coup dans des souvenirs quasi-mystiques. Il y a... onze ans, déjà!, je découvris dans l'exercice de mes nobles fonctions de localier et dans le diocèse de Metz une forme moderne d'Inquisition assez exemplaire. Je dis Inquisition pour faire du style, mais – bien qu'ils soient tous deux dominicains , l'évêque  ci-régnant  n'est quand même pas Torquemada; il ne faut pas exagérer. Je ne fus donc pas brûlé en place publique, mais tout juste mis à l'index, ce qui est une bonne expérience professionnelle.


Donc, en février 2002, je fus alerté par la rumeur publique d'un fait assez rare pour exciter la curiosité d'un journaliste: un curé des environs avait, au cours d'une messe du samedi soir, informé ses paroissiens qu'il était débarqué de son ministère. Non pas pour une histoire de mœurs comme l'Eglise catholique nous en livre parfois, mais pour un désaccord théologique sur la nature divine de Jésus-Christ!

Le Républicain Lorrain - 12 février 2002
Je menai en quelques heures un enquête assez détaillée pour confirmer que le brave curé était bien en passe d'être démis de ses fonctions, sans doute pour la raison qu'il invoquait lui-même, mais aussi pour une série d'autres désaccords avec ses confrères qui me furent suffisamment confirmés pour que j'en fasse état dans le journal qui me faisait et me fait toujours l'honneur de m'employer. Tempête dans un bénitier! Une semaine plus tard, tous les prêtres du diocèse recevaient la lettre que je reproduis ci-dessous, signée par le vicaire général de l'évêché, pas moins.

«Aux prêtres et diacres, zone pastorale de Metz.
«L'occasion faisant le larron, je me permets de revenir sur les événements qui ont agité la communauté de paroisses Saint Quentin.
«Je voudrais attirer votre attention non sur le contenu de cet événement dont le jugement appartient à chacun, mais sur la forme médiatique qui en a été donnée.
«En effet, tout un processus journalistique s'est mis en route qui a donné lieu aux articles que nous connaissons et qui ont choqué plusieurs. Beaucoup de personnes (trop ?) sont intervenues dans ce processus jusqu'à en faire quelque chose d'incontrôlable.
«Que s'est-il passé, du point de vue des médias s'entend?
«17H: Un journaliste téléphone au Service Communication à propos d'une affaire à Ban St Martin. Qui l'a sollicité?
« On lui répond qu'on va s'informer et qu'on le rappellera.
«18H30 - Information complète donnée par l'Évêque et mise au point de la présentation de l'événement: des difficultés d'ajustements relationnels entre des personnes, consécutives à la mise en place de la Communauté de Paroisses Saint-Quentin. L'Évêque a provoqué des réunions de conciliation qui ont échoué. Il attend la lettre de démission évoquée par l’un des prêtres. Aucune décision n'est prise. D'autres griefs ont été faits, à l'occasion des réunions ; ils concernent la liturgie et la prédication. L'Évêque a demandé qu'on s'en tienne à la discipline de l'Église et à  l'interprétation commune des textes.
« 20H: Le Directeur de la Communication contacte le journaliste pour lui donner le point de vue officiel sur cette affaire. Mais le journaliste a déjà fait le tour. il a contacté un ou  plusieurs prêtres, des laïcs, etc. Son opinion est faite. La présentation faite par l'Evêché veut cacher des choses plus graves.
« L'édition messine du matin titre sur le « procès théologique ».
«Que peut-on en tirer comme leçon pour l’avenir ?
«Ce qui reste dans l'esprit de beaucoup c'est le titre qui a lancé « l'affaire» et le soupçon jeté sur l'autorité diocésaine accusée de « chasse aux sorcières ». Les articles suivants ont pondéré et essayé de rétablir les faits à leur véritable niveau, mais le mal est fait.
«Lorsqu'un prêtre, ou un laïc responsable est contacté par un journaliste, il est impératif de renvoyer d'abord au Service Communication de l'Évêché. Le contact pourra se prendre après; mais on aura eu le temps de voir comment aborder la question, Le passage obligé par la Com donne du recul à tout le monde. Il faut s'y tenir absolument, même si le journaliste dit qu'il est pressé, que le journal doit être bouclé ou qu'il connaît très bien le responsable de la Communication ! Un journaliste est un être humain! Il a ses opinions et ses idées. En l'occurrence. le journaliste en question a visiblement fait passer ses idées avant la vérité des faits, mais c'est ainsi que « ça» fonctionne. Il vaut mieux savoir à qui on a à faire. Le Service Com est aussi là pour cela et à force, on finit par connaître la manière de réagir des journalistes.
Il faut abandonner l'idée simpliste qu'un journaliste, ou un journal, est «aux ordres». Ils sont très sourcilleux pour tout ce qui touche à leur indépendance. A cela s'ajoute une inculture de plus en plus évidente en matière religieuse. Tout cela ne rend que plus nécessaire une gestion «à distance» des contacts avec les médias.
«On paie pour apprendre! mais il est inutile d'y laisser des fortunes, surtout lorsqu'elles se monnaient en contre-vérités, en erreurs ou en atteinte à la dignité des personnes et des institutions
«Je sais que chacun essaie d'en tenir compte, mais, avec les médias, seule une action collective, raisonnée et concertée, permettra de réduire les écarts inévitables entre ce qu'on voudrait transmettre et ce qui est effectivement transmis.»
Merci pour votre patience durant cette longue lecture. Cette lettre est assez révélatrice de la conception que les services de communication, fussent-ils en relation avec l'Esprit Saint, se font de la presse et de son rôle: «Ce qu'on voudrait transmettre et ce qui est effectivement transmis»... N'est-ce pas délicieux? Au demeurant, en retrouvant ce document onze ans plus tard, je reste assez flatté par l'hommage que cette éminence rendait involontairement à mon travail en particulier, et à la volonté d'indépendance des journalistes en général. Et on méditera sur les conseils qu'il donne à ses confrères, notamment sur la nécessité de choisir ses interlocuteurs parmi les journalistes supposés «amis». Et en fin de compte, j'ai l'impression qu'au-delà du contexte, cette missive pourrait être revendiquée par pas mal de responsables de la communication dans toutes les institutions auxquelles nous avons affaire. C'est bien de le savoir...

samedi 9 février 2013

« Les syndicats ne font rien...»

Ça fait trop longtemps que je ronge mon frein; alors voilà: je l'avoue, je suis fatigué. Fatigué de me faire apostropher dans les couloirs, au téléphone ou sur la boîte Outlook, fatigué de me faire engueuler (même gentiment) par des employés et des journalistes – surtout des journalistes – sur le thème: «Ma carrière est bloquée, mon salaire reste au plancher, mon chef me brime, etc... et les syndicats sont inefficaces!»

Pour les visiteurs, il faut préciser que je suis syndiqué. Et même syndicaliste, élu au comité d’entreprise du Républicain Lorrain, ancien délégué, tout ça... Je suis membre de la section CFDT de l'entreprise. Depuis longtemps. Dans une autre configuration, j'aurais tout aussi bien pu être CGT, ou SNJ, ou autre chose. Mon adhésion à la CFDT, je la dois à un journaliste qui a disparu en mer, au large de Tahiti, dans les années 90, et qui dès le début de ma carrière dans les Ardennes m'avait transmis son enthousiasme et son amour de la vie. Il s'appelait Jean-Marie Hanot et était le frère de l'artiste Pierre Hanot, ceci dit pour les Mosellans.

Syndiqué, donc, avec une ou deux valeurs simples, l'idée qu'on ne peut pas surnager tout seul (sauf à appuyer sur la tête du voisin), que dans une boîte (et plus généralement, dans la société) on est embarqué sur une galère qui impose un minimum de solidarité, et qu'on doit un jour succéder aux générations qui se sont battues avant nous. Ça ne me paraît pas très compliqué.

Revenons-en donc à mes gentils collègues. Ceux qui ne sont pas syndiqués, mais qui attendent tout du syndicat. Je ne leur en veux pas de ne pas partager toutes mes «valeurs» – après tout, aucune vérité n'est définitive. Mais je supporte de plus en plus mal cette interpellation: «Vous, les syndicats, vous ne faites rien!»

Admettons. OK, nous, «les syndicats», ne sommes pas à la hauteur. Mais avant de nous engueuler, posez-vous la question: c'est qui, c'est quoi, «les syndicats»? «Les syndicats», ce n'est pas une institution tombée du ciel qui doit fonctionner d'elle-même. Vous n'êtes pas satisfaits de la façon dont «les syndicats» fonctionnent, et surtout des résultats qu'ils obtiennent – ou pas? Vous avez raison! Vous voulez être mieux informés, mieux défendus, mieux considérés? Vous avez raison!

Mais ces putains de syndicats dont vous dénoncez avec justesse la faiblesse, ils ne sont que ce que vous en faites. Nous n'avons que les syndicats que nous méritons. Si vous continuez à regarder la poignée de syndicalistes se débattre comme ils peuvent, en restant les bras croisés et le regard narquois à attendre qu'ils se noient à leur tour... N'attendez pas que la direction vous remercie pour votre passivité, vous coulerez avec le bateau!

Vous voulez des syndicats plus forts, plus écoutés, plus efficaces? C'est chacun de vous, chers collègues, qui a la solution. Quand vous serez à l'intérieur des syndicats, et non plus sur le bord du torrent à regarder s'essouffler les rameurs, alors vous aurez raison de critiquer, et mettre en œuvre le fruit de vos critiques. Prenez votre vie en main, vivez, au lieu de subir et de jouer les assistés! Je ne vous demande même pas de rejoindre la CFDT, qui n'est ni meilleure ni pire que les autres. Syndiquez-vous où vous voulez, à la CFDT, au SNJ, à la CGT, créez une section SUD ou ce que vous voulez si vous le préférez, mais prenez-vous en main! Et je vous le promets, vous ne serez pas seuls. A vous de voir; moi, je vous le dis, je suis fatigué...

En prime, un poème de Pablo Neruda qui me semble assez bien dans le contexte. Ne me remerciez pas.
 Il meurt lentement
Celui qui ne voyage pas,
Celui qui ne lit pas,
Celui qui n’écoute pas de musique,
Celui qui ne sait pas trouver grâce à ses yeux.
Il meurt lentement
Celui qui détruit son amour-propre,
Celui qui ne se laisse jamais aider.

Il meurt lentement
Celui qui devient esclave de l’habitude
Refaisant tous les jours les mêmes chemins,
Celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur
De ses vêtements
Ou qui ne parle jamais à un inconnu.
Il meurt lentement
Celui qui évite la passion
Et son tourbillon d’émotions
Celles qui redonnent la lumière dans les yeux
Et réparent les cœurs blessés.

Il meurt lentement
Celui qui ne change pas de cap
Lorsqu’il est malheureux
Au travail ou en amour,
Celui qui ne prend pas de risques
Pour réaliser ses rêves,
Celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
N’a fui les conseils sensés.
Vis maintenant

Risque-toi aujourd’hui !
Agis tout de suite !

Ne te laisse pas mourir lentement !
Ne te prive pas d’être heureux !