mercredi 21 septembre 2011

Petite résistance au quotidien

Les aventures de la Filpac de Sud-Ouest évoquées ci-dessous me rappellent une historiette vécue par un confrère aujourd'hui retraité, Jean-François Donny (bien plus lointaine dans le temps et sans grand rapport, mais je suis ici pour me faire plaisir, et si vous n'êtes pas contents, etc). Il s'agit d'un de ces petits actes de bravoure sans beaucoup d'importance qui émaillent la vie des localiers sans laisser trop de traces dans l'Histoire, mais qui nous rappellent qu'il est bon de rigoler de temps en temps.

En ce temps-là, Jean-François Donny était journaliste à La Nouvelle République du Centre-Ouest, basé à Issoudun, dans l'Indre. Dont le maire de l'époque était André Laignel, un socialiste qui eut ses heures de gloire. Le moins qu'on puisse dire est que le journaliste et le maire ne s'entendaient guère, le second se comportant, selon Donny, comme beaucoup de ces notables de province proches de l'autocratie.

«A Issoudun, raconte Jean-François Donny, il fallait marcher droit, filer doux et, pour ce qui me concernait, manier docilement la plume.» Situation bien connue, qui conduisit inévitablement le localier à entrer en conflit avec le maire. Un beau jour, le plumitif ayant déplu, il fut tout bonnement interdit de reportage sur les affaires municipales. Il advint que Laignel inaugura un matin une nouvelle déchetterie, événement important pour la localité. Arrive le journaliste, avec son calepin et son appareil photo.  Récit de Jean-François Donny:
«Je vis Laignel fendre le pack de ses supporters et foncer droit sur moi, avec son rictus des mauvais jours.
– Monsieur, vous n'êtes pas invité, me balança-t-il, les lèvres crispées.
– Mais, mais..., bégayai-je totalement pris au dépourvu.
– Partez, monsieur!
Je m'esquivai sous le regard muet de la petite assistance médusée. Je ravalai ma colère, pourtant grande et violente, et je marchai sans un mot vers ma voiture.
La Nouvelle publia le lendemain une photo blanche dont on me parle encore souvent. Une photo blanche, c'est-à-dire un rectangle vide figurant l'inauguration d'où Jules-Ferdinand Déline [pseudo choisi par Donny] avait été viré comme un galeux.»
Il fallait le faire! Le plus joli dans l'histoire est que le journaliste obtint le soutien de sa rédaction en chef.

Je ne suis pas certain que ce genre d'insubordination serait encore possible dans notre XXIe siècle démocratique. On peut rêver...

Cette anecdote est tirée du livre de souvenirs publié par Jean-François Donny aux éditions Mains Nues, sous le titre Les Chiens écrasés. Jean-François Donny, originaire du beau département de la Meuse, fit ses débuts en 1977 à L'Est Républicain, puis l'essentiel de sa carrière à La Nouvelle République du Centre-Ouest. Il est le frère du peintre Phil Donny, qui n'est pas triste non plus.

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