Chacun avec ses moyens...
Dans le journal qui me fait l’honneur de m'employer, l'édito d'hier – deux jours avant le début du "démantèlement" du camp de migrants de Calais. Ça fait du bien de se lâcher.
Petit courage
Parce qu’un hiver de plus serait un hiver de trop, le
gouvernement va disperser aux quatre coins de la France quelque 7 000
émigrants échoués à Calais. Pour réussir ce « défi humanitaire », les
ministres Cazeneuve et Cosse mobilisent régions et départements. Bravo,
mais l’on sait que même si des maires courageux ont déjà pris leurs
responsabilités, bien des élus locaux feront tout pour y échapper.
Parfois par calcul, pour capter les bénéfices du pire populisme. Plus
souvent encore par peur ou par lâcheté. Certains s’effarouchent du choc
qu’ils entrevoient entre leurs administrés et leurs futurs hôtes
imposés. D’autres cèdent à la panique, et rares sont ceux qui empoignent
la question pour envisager avec leurs électeurs l’intérêt général.
Et
si, de ce désastre, les Français faisaient une chance ? La chance de
rendre à leur pays sa mission universelle d’accueil et de protection des
victimes de la violence ou de la misère. La chance de rester, ou de
redevenir, les fiers héritiers des Lumières...
Alors, ne
revient-il pas aux citoyens de démentir les carriéristes et les poltrons
? En ne se contentant pas de jeter un regard apitoyé sur les images de
la télé ou d’internet, mais en mettant la main à la pâte, pour prodiguer
accueil et dignité aux proscrits. Chacun avec ses moyens. Activement.
Concrètement. Comme ont su le faire les centaines de milliers d’anonymes
qui, depuis Coluche, font vivre les Restos du cœur, sans faire campagne
pour personne, juste pour la satisfaction de mettre un peu d’humanité
dans un monde tellement frileux.
Ce petit courage-là ne serait ni
de gauche ni de droite. Il ne serait pas non plus la charité ni la
pitié. Il serait simplement, humblement, l’expression d’une France en
paix avec elle-même. Pas une France apaisée parce qu’elle ferme les
yeux, mais une France qui aurait enfin trouvé le sens du troisième terme
de sa devise : fraternité.
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