mercredi 25 novembre 2009

Un perroquet à l'Hôtel de Région

«Petit déjeuner de presse» l'autre matin autour du président (actuel) de la Région Lorraine. Concrètement, une demi-douzaine de journalistes travaillant pour la radio du diocèse (mais si, ça existe !), l'hebdo de l'évêché (bis, on est en Moselle, quand même), le quotidien local dont l'actionnaire est une grande banque mutualiste et désintéressée, l'hebdo « indépendant » (qui a aussi des actionnaires, également désintéressés), etc., prennent le café avec ce grand élu sarcastique, qui leur dit tout le bien qu'il pense de lui-même et tout le mal qu'il pense d'un peu tous les autres. C'est sympa pour entamer une journée de labeur, et comme on n'est pas là pour en tirer forcément un article, autant en profiter en savourant le croustillant des croissants.

Mais il y a toujours un cuistre pour vous gâcher le plaisir. Ce matin, ce sera ce confrère hyper techno, hyper branché, hyper tout, qui place à côté de sa tasse de jus son mini-micro-ordi et pianote sans arrêt tandis que le grand élu déroule sa partition. Et qu'est-ce qu'il pianote-t-il? Il «dialogue», ce brave jeune homme. Via Twitter, il recueille les questions de ses «followers» auxquels il rend compte des propos des uns et des autres. Bref, il est ici mais il est ailleurs, il écoute d'une oreille et comprend d'un hémisphère cérébral.

Et en plus, il cause. Pour répéter au Grand Président les questions qui défilent sur son petit écran. Et là, ça devient complètement n'importe quoi. Notre prétendu journaliste se fait garçon de courses. Sans même prendre le temps d'analyser le sens des questions qu'on lui prie de débiter, sans avoir eu lui-même le besoin de préparer quoi que ce soit, vu que ce sont les «followers» qui s'en chargent, il occupe le terrain et monopolise l'attention.

Jusqu'à ce que le président, Jean-Pierre Masseret, finisse par le renvoyer à ses petits jeux: «Je ne vois, lui rétorque-t-il au bout d'un moment, pourquoi je répondrais à des gens qui ne s'identifient pas.» Je ne suis pas un adorateur béat du dit Masseret, mais sur ce coup-là, merci à lui pour cet éclair de lucidité. S'il invite des journalistes, je suppose que c'est aussi pour savoir ce qu'ils ont compris de l'air du temps. Désolé, JCDR,mais si on fait faire le boulot par n'importe qui n'importe comment, autant le dire tout de suite à nos patrons: n'employer que des standardistes leur coûtera moins cher.
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A lire aussi, si ça vous dit : http://www.slate.fr/story/11825/twitter-facebook-journalistes-ego et les excellents billets du camarade Stéphane sur http://www.stephanegetto.com/.

17 commentaires:

  1. Point de vue intéressant, quelques questions pour bien comprendre:

    JCDR posait les questions en son nom ou disait qu'il les posait au nom de quelqu'un?

    Les questions étaient elles ou non pertinentes?

    Ne s'agit il pas plutôt d'un débat de fond à avoir sur l'utilisation des nouveaux outils numériques pour le métier de journaliste?

    Merci
    Bonne journée

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  2. Vous avez une réponse de JCDR sur son blog

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  3. Ce qui me semble bizarre, c'est qu'un journaliste ne puisse pas se faire le relais d'autres citoyens qui, eux aussi, ont des questions à poser, mais n'ont pas eu la possibilité d'être présents ou invités.

    Cette interactivité a tout de même quelque chose de fort intéressant, non ?

    L'intérêt des questions des uns étant soumis à l'avis, la culture, le cadre de référence et l'opinion de chacun... porter un jugement sur ce sujet ne serait pas constructif.

    Ce monopole de l'information par les journalistes est, à mon avis, et en 2010, une utopie réservée à certains journalistes de l'ancienne école...

    ...pourtant ceux là même qui à une certaine époque criaient au loup lorsque les personnes et les systèmes ne voulaient pas changer.

    Le privilège du droit à la question n'est plus d'actualité, la nécessaire adaptation à l'environnement, elle, l'est tout à fait.

    Je ne suis pas un fan de JCDR, dont la personnalité parfois est exaspérante, et la capacité à s'auto-écouter époustouflante (et je ne parle pas de sa coupe de cheveux par grand vent).

    Mais force est de constater que, lui au moins, teste les outils qui feront le journalisme de demain, s'adapte à la réalité et ne se laisse pas dépasser.

    Car l'enjeu est là : un Masseret ou un autre seront bien obligés d'être confrontés à des questions d'anonymes, à tout bout de champ, ici ou aileurs, sur le net ou en réalité.

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  4. jean-louis baudoux25 novembre 2009 à 19:19

    « … Concrètement, une demi-douzaine de journalistes travaillant pour la radio du diocèse (mais si, ça existe !)… »
    Je m’interroge : vision, apparition ou fragilité d’un témoignage ?

    Est-ce l’effet de la fatigue, la mauvaise qualité des croissants ou une réelle vision ?
    1) toujours est-il que oui des journalistes travaillant pour la radio de l’Evêché, cela existe.
    2) Sauf que ce matin-là, je n’y étais pas… et aucun d’entre nous.
    Alors merci qui ? merci Bernard !

    Bernard, on peut entamer le procès en canonisation de Jean-Pierre Masseret, il a fait un miracle : faire apparaître un journaliste de Jerico sous tes yeux !
    Fallait que ça arrive, à force de faire des références catholiques dans ses digressions.

    Phase deux du miracle Masseret : la lévitation. Je viens de discuter avec Stéphane Getto, c’est programmé pour la prochaine CdP et c’est pas de la com’ Vivement la plénière…

    C’est connu, amen, cela rime avec JPM !

    bon, je vous laisse et retourne à mon Croire en l’église, c’est (beaucoup) plus instructif…

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  5. Bon alors mon nanar, coup de fatigue ?

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  6. Ben dites donc, dès qu'on touche au sacré, c'est le branle-bas ! Ca fait bien plaisir quand même, allez... Alors :
    MMA -> JCDR répond lui-même à la question sur son blog. J'ajoute que quand une question lui paraissait vraiment trop con, il s'excusait auprès du pdt dans le genre "désolé, c'est pas moi, je ne fais que transmettre..." Justement !
    FRANTZ -> On ne va pas régler en 2 phrases le débat entre la démocratie délégative, la démo participative et la démo directe, mais ça fait bien partie du pb. Sommairement, je dirais juste que si le journaliste n'apporte aucune valeur ajoutée, alors, autant qu'il aille se pendre. Mais il y a plein d'autres choses à voir là-dedans ; on y reviendra.
    MATTHIEU -> Et toi, fils, ça boume ?
    JLB-> Ben je peux tellement pas me passer de vous autres que j'ai fait un lot. C'est vrai que ça aurait dû me frapper: Masseret n'a pas cité 1 seule fois l'Evangile, ce qui prouve qu'il a remarqué ton absence, lui.

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  7. Bonjour,

    Je faisais partie des personnes qui suivaient "en live" la conférence de presse de Jean-Pierre Masseret, via Twitter.

    A ma connaissance, personne n'a demandé à l'ami JC de poser les questions qu'il recevait en réponse à ses tweets.

    Reste que certaines d'entre elles n'étaient pas aussi "connes" que certains ont bien voulu le faire croire. Ainsi, était-ce si "con" de demander à M. Masseret s'il comptait augmenter les impots après sa réélection (sachant qu'il s'en est bien gardé en cette année pré-électorale et qu'il affirmait lors de la conférence de presse, à l'emporte-pièce, que, si elle gagnait, la droite les augmenterait) ?

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  8. Salut Bernard,

    Je suis globalement d'accord avec ton point de vue. Il me semblait que la profession de journalistes demandait un peu de recul...

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  9. Sans "s" le journaliste ce sera mieux

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  10. Salut tout le monde !
    Manu, tu peux laisser le "S" : journaliste = 1 profession, mais plein de métiers (journaleux porte-micro, journaleux porte-plume, journaleux dépiauteur de dépêches, journaleux faiseur d'images... etc!). N'empêche que à quelque endroit de la chaîne il se trouve, rien ne l'empêche de respecter son public, et c'est bien le respecter que de ne pas faire n'importe quoi. A mon avis, hein... Et, RAPH, bien sûr que personne n a demandé à notre ami JCDR de répéter ce qui s'inscrivait sur son écran. Ce que je critique, c'est bien le fait qu'il en prenne l'initiative.
    Je le trouve pas si mal, ce débat...

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  11. Ouh la vache, ça taille par ici! J'avais pas vu cette note mais on m'avait parlé d'une altercation. Fichtre!

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  12. Suiveur de jcdr, utilisateur de twitter et étudiant en webjournalisme à metz, j'avoue peiner à comprendre votre position.
    Comment peut-on aujourd'hui encore s'opposer à cette interactivité, à la richesse du direct que peuvent apporter les réseaux sociaux.
    Le journaliste doit prendre du recul oui. Mais au moment d'écrire son article ou son enrobé sonore. La crise de la presse tire en partie ses racines dans une dégradation du rapport entre les journalistes et les lecteurs.
    Des personnes comme JCDR et les journalistes "hyper branchés" sont l'occasion de renouer un contact direct et de confiance. Après, je pense les journalistes assez conscients pour analyser la pertinence d'une question même dans l'immédiat. Il me semble qu'il y a un terme qui englobe ce concept : shiva ;) il fait si peur aux journalistes papier d'ailleurs...

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  13. Merci pour l'ajout dans la liste de lien, j'en ai fais de même.

    Conclusion taquine: les blogueurs c'est comme dansla vie; les journalistes aiment bien s'engueuler sur le journalisme, les politiques sur la politique ... je vais aller vérifier si c'est vrai pour le scrapbooking (une catégorie fondamentale du web comme je l'ai découvert il y a quelques jours).

    J'ai bien aimé la réponse de JCDR parce qu'il souligne les limites de son exercice. Pour moi il est clair qu'il est en mode expérimental. Il faut tester les limites ou l'intérêt de tel ou tel outil...
    A titre personnel, j'avais bien aimé sa manière de dynamiser la campagne municipale sur le web et il a contribué à créer des vocations pour débattre

    la pratique de JCDR et ce débat même vif sont d'importance pour dégager de nouvelles pistes pour le journalisme, métier particulièrement complexe et sous pressions (technologique, économique, éthique) par les temps qui courent

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  14. Ouah ! J'suis loin et j'connais pas "JCDR" et les autres mais t'as tapé là où ça démange. Quel débat !
    Salut.
    Bob.

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  15. Tiens, une fois de plus, le Réplo a trois wagons de retard. Il faut savoir vivre avec son temps messieurs les journaleux.

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  16. Erreur, cher Hervé, car :
    1. Je ne suis pas le Répu à moi tout seul, et même il n'y a aucun rapport entre cet estimé journal et ce blog ;
    2. Le Répu utilise déjà Twitter. Ben oui !

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  17. Ah ces déjeuners de presse: de grands moments ou l'on rencontre des pseudos journalistes de sites internet ou radio ou titres (avec 80 pour cent de pub ou de publi rédactionnel) intéressés par tout sauf par l'info. Et on arrive souvent à ce genre de connerie. Un animateur de radio musique a donf type v... Radio ou M... Fm qui joue les Alain duhamel version ce qu'il y a plus de médiocre sur cette terre. Et quand ils sont plusieurs, lui et ses potes dans son ordi, vaut mieux se barrer! Car la, c'est inssuportable. Je rejoinds tout à fait l'auteur de ce blog sur ce point. Imaginez uni tribunal ou le public prendrait la parole et que les avocats argumenteraient sur tout sauf du droit. C'est la fin des haricots! Les conférences de presse doivent être réservés aux journalistes professionnels. Tout simplement. Moi si je veux poser une discuter ou interroger un people ou un politique, je vais sur un réseau social ou me connecte lors de rdv prévu à cet effet. Je coupe pas la parole. C'est ce qu'on appelle la politesse, non? Sam

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